Le clavecin est un instrument à cordes fascinant, marquant l’histoire musicale du XVIe au XVIIIe siècle. Contrairement au piano moderne, ses cordes pincées produisent un timbre brillant et percutant, grâce aux sautereaux actionnés par le clavier.
Son mécanisme unique repose sur une table d’harmonie qui amplifie les vibrations. Les compositeurs comme Bach et Couperin ont exploité ses nuances, créant des œuvres intemporelles.
Aujourd’hui, des passionnés comme Wanda Landowska ont ravivé son héritage. Cet instrument incarne l’élégance baroque tout en inspirant les musiciens contemporains.
Introduction au clavecin, un instrument à cordes pincées
Issu du psaltérion médiéval, le clavecin marque une révolution dans l’histoire des instruments à clavier. Adapté avec un mécanisme de pincement, il remplace progressivement le luth dès le XVIe siècle.
- Le virginal, compact et rectangulaire, idéal pour les salons.
- L’épinette, en forme d’aile d’oiseau, privilégiée pour sa sonorité douce.
- Le clavecin classique, doté de plusieurs jeux pour varier les nuances.
Son principe acoustique repose sur des cordes métalliques tendues, pincées par des sautereaux équipés de plumes d’oie ou de plectres en cuivre. Ce système génère un son cristallin, typique de la musique baroque.
| Format | Dimensions | Usage |
|---|---|---|
| Virginal | 50 x 20 cm | Privé, musique de chambre |
| Épinette | 80 x 30 cm | Concerts intimistes |
| Clavecin | 180 x 90 cm | Orchestres baroques |
Au cœur des cours européennes, cet instrument incarne l’élégance musicale avant l’avènement du piano-forte. Ses variations de timbre, comme les jeux de luth ou de basson, enrichissent son répertoire.
L’histoire et l’évolution du clavecin
Dès la Renaissance, le clavecin s’impose comme un joyau musical. Son héritage technique et artistique a marqué l’Europe, des ateliers flamands aux cours françaises.
Les origines : du psaltérion au clavecin
Le plus ancien exemplaire conservé date de 1521, fabriqué en Italie. Issu d’instruments médiévaux comme le psaltérion, il adopte un mécanisme de pincement révolutionnaire.

Les sautereaux, actionnés par un clavier, remplacent les cordes frappées. Cette innovation permet une expressivité inédite, exploitée par les compositeurs dès le XVIe siècle.
Les trois formes historiques
Trois modèles dominent :
- Le virginal, compact et rectangulaire, idéal pour les intérieurs bourgeois.
- L’épinette, avec sa forme en aile, offre une sonorité plus douce.
- Le clavecin classique, doté de plusieurs registres, domine les salles de concert.
| Modèle | Caractéristiques | Usage |
|---|---|---|
| Virginal | Cordes parallèles, 50 cm de long | Musique domestique |
| Épinette | Forme courbée, 80 cm | Salons aristocratiques |
| Clavecin | 2 claviers, 180 cm | Orchestres baroques |
L’âge d’or aux XVIIe et XVIIIe siècles
La famille Ruckers, en Flandre, porte l’artisanat à son apogée. Leurs créations, comme le clavecin à double buffet, deviennent des références.
Après 1750, le piano-forte éclipse peu à peu cet instrument. Pourtant, son timbre unique continue d’inspirer les musiciens modernes.
Les cordes pincées : mécanisme et sonorité
Un sautereau actionné par le clavier permet de produire le son caractéristique de cet instrument. Ce mécanisme ingénieux transforme une pression sur une touche en vibration sonore.
Le rôle du sautereau et du plectre
Le sautereau, pièce maîtresse, est équipé d’un plectre en cuivre ou en plume. Lorsque la touche est enfoncée, le plectre pince la corde puis la libère, produisant un son clair.
Un étouffoir en feutre arrête la vibration aussitôt. Ce système diffère radicalement des cordes frappées du piano.
La table d’harmonie et la transmission du son
La table d’harmonie, en épicéa, amplifie les vibrations. Le chevalet, souvent en bois de poirier, transmet l’énergie des cordes à cette surface résonnante.
Comparée à la harpe ou la guitare, la projection sonore est plus directe, grâce à cette architecture unique.
Les jeux et leurs effets sonores
Des registres spéciaux enrichissent le timbre :
- Le jeu de luth, plus doux, évoque les instruments anciens.
- Le jeu de basson ajoute une résonance grave.
- Les jeux de 4 pieds modifient l’octave pour des nuances variées.
| Élément | Matériau | Impact sonore |
|---|---|---|
| Plectre | Cuivre/plume | Timbre perçant ou doux |
| Table d’harmonie | Épicéa | Amplification naturelle |
| Jeux | Combinaisons de cordes | Variation d’octaves |
Ces jeux permettent d’adapter la sonorité aux œuvres baroques ou contemporaines, faisant du clavecin un instrument polyvalent.
La facture du clavecin : des artisans aux chefs-d’œuvre
La construction du clavecin représente un savoir-faire artisanal exceptionnel. Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, les ateliers italiens et flamands ont élevé cet instrument au rang d’œuvre d’art.
Les écoles italienne et flamande : Ruckers et Cristofori
L’école italienne, incarnée par Bartolomeo Cristofori, privilégiait le cyprès pour la caisse. Ce bois léger offrait une résonance chaude, idéale pour les clavecins de salon.
En Flandre, la famille Ruckers utilisait du tilleul ou du peuplier. Leur table d’harmonie en épicéa garantissait une projection sonore puissante, adaptée aux salles de concert.
Les matériaux : bois, cordes et décoration
Le choix des matériaux influençait autant l’esthétique que la sonorité :
- Marqueterie en nacre pour les modèles aristocratiques.
- Cordes en laiton remplacées par l’acier au XVIIIe siècle.
- Décors en parchemin ou peintures à l’huile.
| École | Bois principal | Spécificités |
|---|---|---|
| Italienne | Cyprès | Caisse légère, décors sophistiqués |
| Flamande | Tilleul/peuplier | Table en épicéa, sonorité puissante |
Les ravalements et adaptations au fil des siècles
Au XVIIIe siècle, les artisans français comme Blanchet ont modifié les clavecins anciens. Ils élargissaient l’ambitus pour répondre aux nouvelles compositions.
Des pièces mythiques, comme le Ruckers/Taskin (1646/1780), témoignent de cette évolution. Conservées dans les musées, elles illustrent la pérennité de la facture italienne et flamande.
Les grands compositeurs et le répertoire du clavecin
Parmi les maîtres du baroque, le clavecin a inspiré des œuvres magistrales. Ces pièces, alliant virtuosité et émotion, révèlent la richesse de cet instrument. Du XVIIIe siècle à aujourd’hui, leur héritage perdure.

Domenico Scarlatti et ses 500 sonates
Domenico Scarlatti a marqué l’histoire avec ses sonates. Influencé par les folias espagnoles, il a introduit des rythmes audacieux. Ses compositions, comme la sonate K. 380, mêlent technicité et expressivité.
- Innovations rythmiques : syncopes et contre-temps.
- Structure binaire, typique du baroque tardif.
- Redécouvertes par des interprètes comme Blandine Rannou.
François Couperin et Jean-Philippe Rameau en France
En France, François Couperin et Rameau ont sublimé le clavecin. Couperin, avec des pièces comme Les Barricades Mystérieuses, incarne l’esthétique galante. Rameau, plus dramatique, explore les contrastes dynamiques.
| Compositeur | Style | Œuvre clé |
|---|---|---|
| Couperin | Délicat, ornementé | L’Art de toucher le clavecin |
| Rameau | Virtuose, théâtral | Pièces de clavecin en concerts |
Bach et les Variations Goldberg
Bach a porté le clavecin à son apogée avec les Variations Goldberg. Cette œuvre, d’une complexité contrapuntique inégalée, était conçue pour le Clavier bien tempéré. Elle reste un pilier pédagogique.
Pour explorer ce répertoire, les musiciens s’appuient sur des instruments historiques. Leur timbre authentique restitue l’âme de ces chefs-d’œuvre.
Clavecin vs piano : une comparaison essentielle
Techniquement et artistiquement, le clavecin et le piano incarnent des philosophies sonores opposées. Le premier, héritier de la Renaissance, séduit par sa clarté ; le second, né avec le Classicisme, domine par sa versatilité.

Cordes pincées vs cordes frappées : les différences techniques
Le mécanisme du clavecin repose sur des sautereaux qui pincent les cordes, produisant un son cristallin mais au volume fixe. Le piano, lui, utilise des marteaux frappant les cordes frappées, permettant des nuances dynamiques.
Les étouffoirs du piano stoppent les vibrations, contrairement au clavecin où la résonance s’estompe naturellement. Cette différence influence directement l’expressivité, comme le détaille cette analyse technique.
Sonorité et expressivité : deux philosophies musicales
La sonorité du clavecin, brillante mais limitée en dynamique, convient à la polyphonie baroque. Le piano, avec sa palette allant du pianissimo au fortissimo, répond aux exigences romantiques.
Les claviers modernes privilégient l’émotion individuelle, là où le clavecin exalte la structure musicale. Un contraste qui explique leur usage différencié dans les salles de concert.
Pourquoi le piano a supplanté le clavecin
Inventé par Cristofori en 1698, le pianoforte a séduit par sa capacité à jouer « doux et fort ». L’évolution des orchestres, demandant plus de puissance, a accéléré ce déclin.
Pourtant, le clavecin survit dans la basse continue et connaît un renouveau grâce au mouvement baroqueux. Preuve que cet instrument reste irremplaçable pour interpréter Bach ou Rameau.
La renaissance du clavecin au XXe siècle
Au XXe siècle, le clavecin connaît une renaissance inattendue. Longtemps éclipsé par le piano, cet instrument baroque retrouve sa place grâce à des interprètes visionnaires et des innovations techniques.

Le rôle de Wanda Landowska
Wanda Landowska fut la pionnière de ce renouveau. Son interprétation des œuvres de Bach et sa collaboration avec Falla pour le Concerto pour clavecin (1926) ont redéfini son potentiel.
Elle popularisa les modèles Pleyel-Erard, dotés d’un cadre métallique et d’un pédalier, adaptés aux salles modernes. Ses enregistrements restent des références pour les musiciens actuels.
Les compositeurs modernes et le clavecin
Des compositeurs comme Ligeti et Xenakis ont intégré le clavecin dans des œuvres avant-gardistes. Alain Louvier l’a même associé à l’électroacoustique, élargissant ses possibilités sonores.
- Ligeti : Continuum (1968), exploitant la rapidité des sautereaux.
- Xenakis : Khoaï, mêlant micro-intervalles et percussions.
La facture aujourd’hui : entre tradition et innovation
La facture contemporaine allie artisanat et technologie. Des ateliers utilisent des scanners 3D pour reproduire des modèles historiques, tout en testant des plectres en polymères pour une durabilité accrue.
| Aspect | Traditionnel | Moderne |
|---|---|---|
| Matériaux | Bois massif, plumes | Polymères, métal |
| Techniques | Marqueterie manuelle | Scan 3D + CNC |
| Sonorité | Timbre historique | Adaptation acoustique |
Cette fusion garantit la pérennité du clavecin, aussi bien dans les conservatoires que sur les scènes expérimentales.
Conclusion : Le clavecin, un instrument intemporel
Depuis des siècles, le clavecin captive par son timbre unique. Ses cordes métalliques et sa table d’harmonie en épicéa créent une sonorité inégalée, chère aux amateurs de musique baroque.
Aujourd’hui, il transcende les époques. Des salles de concert aux studios numériques, cet instrument à cordes inspire toujours. Les collections muséales, comme celles du Musée de la Musique à Paris, en attestent.
L’avenir ? Hybridation technologique et répertoires audacieux. Pour en saisir l’essence, écoutez les enregistrements de Wanda Landowska ou de Pierre Hantaï.

